25 Avril 2015
Si tu veux comprendre le mot bonheur, il faut l'entendre comme récompense et non comme but.
en me lisant si tu veux.
Laurent Voulzy - Le reve du pecheur (1992)
Laurent Voulzy : "Le reve du pecheur" video Lyrics :Alain Souchon Music : Laurent Voulzy From the album "caché derriere"
Je voulais que ma chouette petite famille vive dans une chouette petite maison avec un chouette petit bateau au bord de l'eau.
Après dix années vécues, j'ai failli écrire "perdues", mais ça n'aurait pas été vrai : elles ont servi ces dix années vécues enfermées dans les appartements parisiens et les métiers qui payent bien. Elles ont fasconné l'ENVIE majuscule ! Je reprends donc : après dix années de cette vie trépidante et trop pleine de pas grand chose au fond, je rencontre mon Homme autour de la même ENVIE de l'eau de l'océan. C'était fin 2000.
Vu qu'on a mis les voiles et quitté la capitale en juillet 2012, tu vois que c'est pas tout d'suite-tout d'suite qu'on l'a rejoint notre Atlantique. C'est pour redire que c'est pas du tout cuit, le bonheur. Mon Homme avait des enfants d'un premier mariage. Et des pas grands en plus. Voire franchement petit pour la dernière née de la fratrie. On se disait qu'il fallait attendre qu'elle ait dix-huit ans, l'âge des études qui lui ferait quitter naturellement le nid, sans brusquerie.
En 2009, l'ENVIE ressurgit tout de même. Boum. La pitchounette est loin d'avoir dix-huit ans. Mais je suis très près de la catastrophe à quarante : cancer du sein. Le deuxième cancer. Alarme ! Mon Homme et moi, on se dit qu'il faut sans doute pas trop jouer avec l'ENVIE : on pourrait bien ne pas avoir le temps de se la concrétiser finalement... Cette année là, en vacances à Borme les Mimosas (vacances interrompues par un aller-retour à Villejuif pour les derniers examens avant les traitements), on se décide. C'est décidé oui : l'ENVIE, on s'y colle sérieusement maintenant. On est en juillet.
À la rentrée, mon Homme réfléchit au métier qui lui permettra de travailler à distance de la mégapole. Je me soigne. Il réfléchit. Janvier 2010, je me fais amputer le néné. Il réfléchit. Je me soigne. Il quitte son entreprise. Je l'aide à créer sa nouvelle activité quand je ne me soigne pas. Je calcule que l'on peut vendre la maison de Massy et acheter sans emprunter au bord de l'océan. Ben oui, les banques refusent de me prêter de l'argent depuis 1996, faut bien faire sans. J'ai la chance de pouvoir faire sans. Décembre 2011, je trouve notre maison au bord de l'océan ! la maison de Massy.
Juillet 2012, le 12, nous ouvrons les cartons dans la nouvelle maison de l'océan... Et j'apprends la récidive. Au milieu des cartons, plein de cartons, plein de métastases dans les poumons. Et dans le foie. Et les os aussi. Je me vois morte dans les six mois. La petite entreprise de mon Homme elle, meurt à ce moment là, flinguée par l'incompétence d'un partenaire. Sale période. Je me soigne. Mon homme se blesse grièvement. , hop la main de mon Homme se redresse ! Et notre moral aussi.
Le printemps vient. Les projets reviennent. Mon Homme sera marin finalement ! Juillet, il reprend des études. À Nantes. À Nantes, je me soigne. Je vais arrêter de dire que je me soigne : depuis la récidive métastatique, tu as compris, je serai malade pour toujours. Je me soigne donc ad vitam pas eternam, pour le meilleur et pour le pire. Et je jure de me soigner jusqu'à ce que la mort me sépare de mon traitement. Mon Homme apprend le métier. Il le pratique aussi. Sur un chalutier. Un ligneur. Un fileyeur. Un caseyeur. Je ne le vois pas souvent. Avec les petits hommes plein de vie et la vie sans mon Homme, je suis vidée... Et l'hiver s'installe. Mais pas les doutes. Nous sommes sûrs de nos choix. Nous sommes à notre place. Nous le savons. Et paf ! Le bonheur nous tombe dessus.