9 Octobre 2017
Le PAC, c'est pour Port À Cat.
Cat, c'est pour Cathéter.
En clair, le PAC c'est une boite d'un centimètre cube à peu près.
On te la pose sous la peau et sous la clavicule et sous anesthésie locale la plupart du temps. La boite est reliée à une bonne grosse veine du cou.
Pour ne pas abimer les veines périphériques avec les traitements, ou quand elles sont déjà esquintées et impiquables comme les miennes, on pique dans la boite et zou, tout ça part direct dans le cathéter, puis la veine et se répand partout.
L'avantage, c'est que la pose de l'aiguille marche à tous les coups ou quasi. Avec une crème anesthésiante dessus, même pas mal ! C'est un vrai progrès ce PAC. En 96, pour mon 1er cancer, ça n'existait pas. Toutes dans les veines les injections... Dur... J'avais les trajets veineux noirs sous la peau. Fallait même pas m'effleurer les avant-bras, tant ils étaient douloureux.
On m'a (mal) posé le premier en 2009 à l'Hôpital Privé d'Antony.
Le gars devait pas être bien à l'aise encore. Il a commencé par m'anesthésier tout à fait, histoire d'avoir une paix ABSOLUE j'imagine : moi, quand je m'isole pour faire un truc, c'est que je suis pas bien sûre de ma réussite, que j'ai pas envie d'avoir des spectateurs pour mes tâtonnements. Quoi qu'il en soit, faut croire que ça n'a pas suffit à la concentration du bonhomme parce que je me suis réveillée avec le machin placé trop bas, dans le sein gauche !
En 2010, chez Gustave, avant la mastectomie-reconstruction, comme mon PAC était dans le champ opératoire, ils ont dû me le retirer pour le remonter. Sous anesthésie locale cette fois. Ça me vaut aujourd'hui un des grands souvenirs de mon histoire chirurgicale : moi, sur la table d'opération, en pleine conscience de la galère du chirurgien pour me retirer le bidule, bien enserré dans les chairs. Je ne souffre pas. Mais je sens dedans que ça tire, que ça racle... Et que ça râle dehors : mon chirurgien s'énerve.
"Putain ! Quelle merde ! Il est bien accroché !"
Il continue de gratter en jurant comme un charretier.
"Il viendra jamais, c'est pas possible... Putain de bordel de merde Danielle, éclairez-moi le bazar, je vois pas ce que je fais là !"
L'infirmière qui l'assiste n'y est pour rien, mais c'est elle qui prend pour mon PAC récalcitrant. Elle semble avoir l'habitude. Elle empoigne la lampe en me jetant un regard réconfortant. Elle a l'air de me dire "t'en fais pas petite, je connais le gaillard, il s'énerve comme ça, mais il va y arriver". Je tends le cou bien raide de l'autre côté pour laisser plus de place encore à mon chirurgien-râleur et l'aider d'avantage.
"Ça y est ! La vache !"
Il brandit la bestiole au dessus de sa tête comme un chasseur satisfait exhibe son gibier. Il me demande si je souhaite le conserver. Je réponds oui sans trop réfléchir. Pas par fétichisme. Plus parce que je ne veux pas regretter d'avoir dit non. Il sera toujours temps de jeter le PAC à la maison si je change d'avis...
Les années ont passé et je ne l'ai pas jeté. Il est enfoui au fond de mon tiroir à chaussettes. Quand il m'arrive de tomber dessus inopinément, la scène de cette opération colorée remonte et je souris.