2 Mai 2019
J'ai trouvé cet article synthétique sur la technique :
Voici maintenant ce qui m'arriva à moi ce matin, sous les mains de Bénédicte à Saint Marc, recommandée par Peggy à La Baule :
Pour commencer, Bénédicte ne fait pas feu de tout poil. Elle ne tatoue que du sourcil, du sourcil et encore du sourcil. On peut dire en somme que le sourcil, c'est sa spécialité. C'est plus sûr, plus rassurant. Le sourcil étant un peu central sur nos trombines, faut pas se louper.
Bénédicte est sérieuse : pour commencer, elle questionne tout azimut. Mes antécédents, suis-je cardiaque, asthmatique, allergique, compliquée de la cicatrice en général ? Mes traitements, des anti-coagulants ? Elle prévient que je peux saignoter plus que la normale avec mes piquouzes quotidiennes d'Innohep pour me déboucher la jugulaire. À quand remonte la dernière chimio ? Mieux vaut tatouer à distance pour que les plaquettes aient eu le temps de se refaire. Je précise que Super Mario m'a donné son accord. Une IRM ou une scintigraphie sont-elles prévues bientôt ? L'une et l'autre peuvent irriter les zones pigmentées. La grossesse et l'allaitement contre indiquent aussi la pigmentation. Sans surprise, Bénédicte me dispense de ces questions-ci. Je signe un "consentement éclairé" et je peux m'installer.
Je suis assise dans un grand fauteuil devant le miroir et devant Bénédicte. Elle explique : "La dermopigmentation, c'est un maquillage semi-permanent. J'utilise un appareil stérile et des pigments aux normes. J'implante les pigments sous la peau. La coloration, se verra en transparence pendant plus d'un an. Il faudra revenir avant 3 ans pour entretenir ce qu'on va faire aujourd'hui."
Elle dessine au crayon, le contour de mes sourcils du futur. Cette opération simple en apparence, n'est pas une sinécure. Il y a bien une règle générale pour situer le début, la courbe et la fin de l'arc sur 3 axes reliant l'aile du nez et l'oeil.
Mais le dessin s'adapte aussi au visage. Et puis pour ce premier jet, on y va sagement, pas trop long, pas trop épais. "Je pourrai toujours en rajouter quand on se reverra dans 3 semaines pour les finitions. Mais je ne pourrai pas en enlever". Dans ces conditions Bénédicte, avançons avec prudence en effet. Je découvre les contours crayonnés. Difficile de se projeter. Je fais confiance. Elle me présente maintenant les différentes teintes. La couleur des tubes que j'ai sous les yeux, ne donnera pas la couleur que j'aurai sous la peau. Difficile de se projeter encore. Je refais confiance et zou, me voilà allongée sur la table et sous les mains gantées de Bénédicte.
Je suis prévenue : ça va piquer. Surtout au milieu. Le tatouage du milieu est plus douloureux que le tatouage des pointes. Et le sourcil gauche est plus douloureux que le sourcil droit. Voilà qui est singulier... et qui se révèle parfaitement infondé sur moi : lorsque Bénédicte me zèbre le derme du bout du bout de l'arc, ouille, ouille, ouille ! Je tente l'auto-hypnose récemment expérimentée à l'ICO de Saint Herbain. Téléportation au Japon. Je trempe dans le bain chaud d'un onsen au milieu des bambous géants. Voyons, voyons, sur quoi me concentrer dans mon voyage, pour oublier la morsure de l'aiguille ? La louche de bois clair plongée dans l'eau verte, le ruissellement suave sur mon front, les senteurs de thé Genmaicha... La vache, ça fait mal quand même ! Suis pas au Japon du tout. Suis bel et bien à Saint Marc et je sens tout ! Comme une coupure. Plein, plein, plein de micro-coupures. Autant que de poils gravés, un par un, par Bénédicte. Je me rends compte que je suis contractée, raide comme un steak cuisiné à l'anglo-saxonne (apologies aux Anglais qui me liraient, mais les faits sont là les amis : vos viandes sont over cooked et infectes). Bénédicte me demande si je veux faire une pause. Sans façon Bénédicte, qu'on en finisse. On finit vite, j'en suis surprise. Je n'ai pas trouvé le temps long et c'est bien heureux.
Bénédicte m'invite à regarder le résultat... "ce n'est pas le résultat final", me re-précise t'elle. Dans le miroir, j'ai le sourcil plus foncé et plus épais que ce qu'il en restera.
"Le résultat final, ce sera dans deux petites semaines. Et on se revoit le 21 mai pour retoucher et finaliser. D'ici là, pas de soleil, stick solaire sur les poils si vous sortez. Pas d'eau non plus, si vous devez vous mouiller la tête, penchez la bien en arrière. Pas de maquillage, pas de cosmétique, mais 6 fois par jour, avec des mains propres ou un mouchoir, de la crème cicatrisante, jonctum cica ou homéo plasmine. Vous mettrez sans doute un peu plus de temps que la moyenne pour cicatriser. Vous allez voir, des petites peaux vont se former, ne les grattez pas, elles tomberont seules dans une semaine, peut-être plus."
Je me sens un brin artificielle devant la pharmacienne, lorsque je lui demande peu après, la fameuse crème à tartiner pour cicatriser. Mais je veux bien me farcir 15 jours de face de clown pour en finir avec la face de lune ; c'est ainsi que j'appelais mon visage vide, usé, déboisé par la chimie intensive depuis 2 décennies. Je veux bien y mettre le prix aussi. 295€, les 2 premières séances (pigmentation et finition). Un peu moins de 200€ pour l'entretien ensuite. C'est une somme conséquente. Une de ces dépenses de cancer pour lesquelles nous ne sommes pas prêtes d'être aidées : les perruques, pas les naturelles, ni même les partiellement naturelles, non, les perruques synthétiques, ne sont intégralement remboursées que depuis le 2 avril 2019. Je n'ai pas de mots assez durs pour te dire ce que j'en pense. Ne pas ressasser l'avanie. Vite, téléportation au Japon ! Onsen, bambous, Geinmacha et patati et patata !