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Les crabes dansent au Croisic

Je ne guérirai pas, mais je vis gaillardement (la plupart du temps) : FAUT PAS GÂCHER !

240 minutes de bonheur.

Aujourd'hui, je fais du wiki !!!

 

Késako "Wiki" ?

 

Wiki : n.m. Terme très, très-très, enfantin. Désigne l'activité sportive de montagne qui consiste à se laisser glisser sur des "wikis". Pour illustrer le propos, verbatim du petit homme, haut comme 3 pommes en 2007 : "Moi aussi, ze veux faire du wiki au chalet de la montagne !

240 minutes de bonheur.

Aujourd'hui les amis, je fais donc du wiki.

JE FAIS DU WIKI !

 

JE SKIE !!

 

Je me suis dit hier, certes ma cocotte, tu es un peu abimée. Les poignets patraques, les hanches penchées, les genoux génuflexés et les chevilles déchevillées. Mais tu en a très envie de ce ski, deux ans que en es privée, tu vas le tenter. Après les cours étoilés des petits hommes en fin d’après midi, je décide de m’arrêter à Sport 2000 pour la location de mes wikis. La route unique de la station des pistes au village et les places de parking sont farcies de voitures. Je commence à me dire que ça va pas être du gâteau mon affaire. Mais paf ! Une place, là, juste sous mon nez et juste devant le magasin. Oh ça ma petite, ça s’appelle un sacré coup d’bol, ou un signe amical du grand Taaroa* dans son bénitier là haut, quoiqu’il en soit, je le prends comme un encouragement. Je vais aller au bout de mon envie les enfants ! Me voilà donc assise sur le banc de bois de la boutique. J’ai demandé des chaussures de taille 36. Elles arrivent au bout des bras d’une jeune femme blonde et bien bronzée. Elles sont noires. Les chaussures. Et elles me vont comme mes gants. Je les prends ! Pour les wikis, c’est un jeune homme qui s’en charge. Il est brun des cheveux et rose des joues ; l’air de la montagne sans doute, ou le bon vin. En tous cas, il est grassouillet. Pas gros. Grassouillet. Et ça pas de doute, c’est la faute au bon vin ! Et à la saucisse de foie et au foué du boucher local.  J’ai de belles images de boustifailles montagnardes dans la tête. Le grassouillet rose et brun interrompt mes divagations gourmandes :

« Combien pesez-vous ? »

Ah ben ça… Ca me stoppe tout net les rêves de raclette, de fromage qui dégouline sur la saucisse, de pain plongé dans le caquelon de fondue savoyarde. Flanqué par terre le caquelon de fondue savoyarde. Fendue la fonte, avec tout le fromage autour. Je pèse 3 bons kilos de plus depuis que couic les ovaires, la cortisone et les hormones :

« 53 kilos »

Il règle les fixations de mes wikis en conséquences. Des wikis adaptés aux circonstances, des wikis faits pour une bonne skieuse qui ne skie qu’épisodiquement depuis qu’elle est malade.  Ca y est. Tout il est prêt. Par ici la sortie. A moi le ski !... Aoutche les poignets ! Ils ne sont pas lourds ces skis. Mais ils sont larges. Et de serrer les doigts autour, ça me réveille la douleur de la tendinite des 2 côtés. Bon, je ne vais pas en faire un fromage de montagne. J’avise la voiture à 20 mètres droit devant. Une, deux, une, deux… A chaque pas, je pose les skis à terre comme une immense canne pas très ergonomique. Clac, clac des carres sur la neige sale et dure, clopin-clopant j’arrive à la voiture. Ouverture du coffre. Chargement comme je peux. Dernières douleurs. Serrage de dents. C’est fini, c’est parti !

240 minutes de bonheur.

Sur le dôme tout en haut à 2400 mètres, mazette quel plaisir, quelle satisfaction.

 

Aïe ame ze qouine ove ze oueurlde !!

 

La vue est exceptionnelle depuis le roc d’Aude. Je la connais depuis petite. Elle n’a pas changé depuis ma dernière grimpette en 2012.  Avant le retour du nénuphar, des traitements qui fragilisent encore, de la Nième opération d’ouverture et de fermeture du corps. Me revoilà. Et tout est là. Bien à sa place. Sous mes yeux. Le lac de Matemale au fond de la vallée, comme un saphir sombre, serti de la chaine des Pyrénées catalanes. Les bleus, les verts, le blanc, c’est lumineux, la vache ce que c’est beau !

Je descends. Je glisse avec prudence. Je ne veux pas me casser un os. Je prends de l’assurance. Chouique, chouique, à droite, à gauche, je vire plus serré. Je serre aussi les fesses. Je ne veux pas me casser un os. Je sens bien mes genoux. Mes chevilles aussi. Elles craquent parfois dans les chaussures noires. Je ne veux pas les casser. Je n’ai pas mal aux muscles. Pas mal aux cuisses, pas mal aux mollets. Je suis contente. Je m’en sors bien. Je suis une sportive ! Une sportive fragile. Je file sur le haut de la piste Lagopède du côté de Balcères. Mon passage préféré. Je remarque le petit homme sur le téléski tout à côté. Son groupe de futurs 3 étoilés remonte le Mont Llaret avec Vincent le moniteur. Le petit homme lève une moufle rouge. Il me fait bonjour. Il sourit. Il est fier de croiser sa maman skieuse. Et moi je suis heureuse.

Je me régale. J’en ai plein les yeux et tous les sens. Sur la remontée mécanique, je prends le temps de ressentir. Ne rien rater. Tout savourer. Le soleil chauffe le front. Malgré l’écran total, ça picote à la limite des cheveux et les lèvres aussi. Le vent décolle la tignasse. Il fait pleurer les yeux derrière les lunettes. La neige scintille tout autour comme une poudre de diamants, comme les paillettes de mica sur les pierres que je ramassais petite, dans la pente du chalet. Ca bruisse sous les skis. La vache ce que c’est bon !

Demain je recommence.
Après demain, j’arrête.
2 jours, c’est un bon début.

L’année prochaine, je veux revenir avec mon homme aimé. On fera du wiki ensemble, en famille, avec les petits hommes en file indienne. Ou comme des sauvages, dans le plus grand désordre, à fond, à 4 sur le dôme. Tant pis pour les os, tant pis pour les hanches, les genoux, les chevilles et les poignets !

240 minutes de bonheur.

* Taaora : créateur du monde selon la légende polynésienne. Il habitait un bénitier posé dans le noir et le vide. Il en souleva la coquille et la jeta très haut au dessus de sa tête pour créer la coupole du ciel. C’est là, dans sa coquille, qu’il revint s’installer après son œuvre pour observer les hommes.

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